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Actualatina
17 février 2012

BRESIL - Le Sommet de la Terre ou quand la société civile s'organise pour être au coeur du débat : Collectif France Rio +20

Le Sommet de la Terre de 1992 est encore aujourd’hui décrit comme ayant été un véritable forum citoyen qui a ouvert un espace de discussion nouveau à l’échelle internationale conférant ainsi une visibilité nouvelle aux acteurs sociaux.

Ce rendez-vous a également introduit la notion de développement durable au sein des plus hautes instances initiant ainsi un cycle de conférences à l’ONU sur ce thème. 20 ans après, vient l’heure du bilan : pour le Collectif France Rio+20, nous sommes face à un  échec des gouvernements dans le respect des objectifs fixés (malgré toutes les avancées que l’on peut noter et qui ne sont absolument pas négligeables). Cet « échec » est une idée reprise par les auteurs du site Cupula Dos Povos, qui parlent de « crise du modèle de production et de consommation capitaliste » et de « crise systémique ».

Nous sommes actuellement dans ce que l’on peut appeler la phase préparatoire du prochain Sommet de la Terre qui se déroulera du 20 au 22 juin, à Rio de Janeiro, au Brésil.

Nous nous sommes intéressés au « Collectif France Rio + 20 » qui est particulier en ce qu’il regroupe une cinquantaine d’organisations françaises (ONG, associations, mouvements sociaux et syndicats) dans le but de porter une voix audible et commune à Rio. C’est un jeune Collectif puisqu’il a été créé en juillet 2010. Les déclarations de ce Collectif se basent sur plusieurs grandes idées comme le passage de nos sociétés à des sociétés dites « post-pétrole » ainsi que la construction d’une nouvelle gouvernance mondiale fondée sur la responsabilité des Etats et la consultation de la société civile. Notons également que le Collectif évoque l’idée d’approfondir la voie du multipartisme intergénérationnel et intersectoriel (mettre le citoyen au cœur des décisions) qui avait été la grande innovation de Rio 92.

Quelle est la composition de ce Collectif France Rio +20 ?

4D, ADOME, AEEOG, Agir pour l’environnement, AgriSud, Aitec-Ipam, Artisans du Monde, Association des Populations des Montagnes du Monde, Association Entreprendre Vert... voir toute la liste 

Remarquons que la composition de ce Collectif est pour le moins variée puisque l’on y trouve à la fois des organismes de solidarité internationale, des associations environnementales et des syndicats. « Le projet de société porté par le Collectif Rio+20 propose une vision globale du développement durable, où les dimensions sociales, économiques et environnementales sont intégrées, explique Daniel Geneste, représentant de la CGT pour le collectif. Assurer une réelle protection sociale aux plus démunis permet de créer des modèles de société réellement durables. Notre présence au sein du collectif est donc une vraie valeur ajoutée pour entamer cette transition qui est inéluctable ».  

Notons également que le collectif est en partenariat avec de nombreuses associations internationales comme One Earth Initiative, ENDA Europe, Réseau Climat et Développement ou Jeunes Volontaires pour l’Environnement.

Quelle philosophie commune ? Quels messages le Collectif va-t-il porter ?

Le Collectif a rédigé sa propre Déclaration, fruit d’un an de travail avec les organisations membres. Ils ont vivement critiqué l’avant-projet « draft zero » qui a été publié le 20 janvier car il n’est, selon le Collectif, qu’ « une réaffirmation des principes acquis, de recommandations et d'engagements vagues et anciens. Un texte consensuel, qui vise l'accord de tous en contournant les difficultés ».

En nous appuyant sur leur Déclaration, voyons un peu quelles sont leurs idées pour Rio +20 (nous avons synthétisé le propos pour une meilleure clarté).

 Partir du citoyen et relancer le multilatéralisme : « La transformation du monde se fait sur le terrain ». Par ces mots Pierre Radanne, président de l'association 4D, et coordinateur du Collectif résume la stratégie du collectif Rio+20. Pour lui faut engager la transition du monde vers un modèle de développement plus durable et responsable et cela passe obligatoirement par l'action des citoyens, des syndicats et des ONG. « Les États sont en attente des demandes de la société civile, estime-t-il. Ils sont comme des wagons qui auraient besoin d'une locomotive pour avancer. Nous devons être cette locomotive ». Le collectif demande à ce que Rio + 20 permette de faire évoluer le rôle des acteurs de la société civile « d’observateurs » à celui de « partenaires » dans les processus de concertations et de négociations.

Sur le site d’Oxfam, qui fait partie du Collectif, le citoyen tient un rôle majeur et l’idée de tirer les enseignements du passé est mise en avant :

- Les sommets mondiaux ne débouchent sur de grandes promesses qu'à la demande de la société civile.

- La politique intérieure détermine si ces mesures seront prises ou non.

Ainsi, et c’est l’enseignement de Rio 1992, le citoyen doit non seulement être un acteur à l’origine des propositions, tenir son rôle dans la prise de décisions et surtout suivre ce qui sera fait ensuite aux échelles nationales et locales. 

► Ouvrir les thématiques : L'Organisation des Nations Unies a acté l'économie verte et la gouvernance du développement durable comme thèmes de la conférence. « Beaucoup trop restrictif », estime le Collectif, qui craint de voir dans la bulle de l'économie verte, un nouvel espace de marchandisation pour le système capitaliste. Il faut selon ses membres élargir les perspectives et les thèmes des débats vers une réflexion plus large sur notre modèle de développement. C’est vers un véritable « changement de civilisation » que le Collectif souhaiterait voir s’engager Rio +20. Il demande que la déclaration finale défende "le respect des équilibres écologiques" et la "stabilisation du climat", ainsi que "l'éradication de la pauvreté et la réduction des inégalités". « Nous sommes arrivés à la fin d’un modèle qui appelle à un changement profond, un changement de civilisation» (Déclaration, p.5).

-Rio +20 doit ainsi réinsérer le concept phare de 1992 de la durabilité. Ils estiment que « la quête de durabilité mondiale s'est trouvée reléguée à l'arrière-plan par la crise économique et financière ».

-Rio +20 doit amener à la réduction significative des inégalités par la mise en œuvre sans tarder des règles du Bureau International du Travail sur le travail, la construction d’une protection sociale universelle, une meilleure redistribution des richesses au sein des états, une relocalisation des activités, la mise en œuvre d’une souveraineté alimentaire et énergétique, la transformation des modèles productifs et la stimulation d’une innovation responsable et durable- sociale autant que technologique.

-Rio +20 doit parvenir à « séparer le couple développement économique et pression environnementale »  par l’amélioration des conditions de vie dans les pays en développement en assurant l’accès aux services essentiels et aux droits fondamentaux, des formes de consommation et de production durables, la gestion économe des ressources non renouvelables, une priorité donnée aux circuits courts de production et de distribution et de nouvelles responsabilités sociétales et environnementales pour les entreprises.

► Ce rendez-vous doit être efficace : Rio+20 doit suivre des objectifs « ambitieux, clairs et contraignants ». Ils proposent :

- Que soit mis en place « un cadre international juridiquement contraignant » sous la forme d'un « Conseil du Développement durable » assurant la coordination des agences et programmes, en parallèle du Conseil de sécurité.

- Le renforcement du droit international par l’élaboration d’une Charte universelle de citoyenneté planétaire et des responsabilités humaines.

-La transformation du Programme des Nations Unies pour l’Environnement en une véritable Organisation Mondiale pour l’Environnement : pour éviter un simple changement d’étiquette, il sera nécessaire d’allouer les ressources adéquates et un mandat à la hauteur des enjeux. En parallèle, il est de la plus haute importance de donner à la société civile les outils nécessaires pour prendre part à la gouvernance environnementale onusienne. Cette idée est similaire comme bien d’autres à celle d’EELV (Europe Ecologie, Les Verts). Cette organisation doit être dotée de moyens juridiques pour que le souci environnemental ne devienne pas une coquille vide.

► Un nom à retenir ? « Si Rio est un échec, on aura beaucoup de mal à s'en remettre dans le contexte international de crise », a souligné devant la presse Pierre Radanne, président de l'association 4D (Dossiers et Débats pour le Développement Durable), à l'origine de la création du Collectif.

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Pierre Radanne est un expert des questions énergétiques et écologiques, spécialiste des politiques énergétiques de lutte face au changement climatique.

Dans les années 1970, il fonde avec Dominique Plancke le deuxième groupe des Amis de la Terre à Lille, avant de fonder la Maison de la nature et de l'environnement. Il crée « Futur Facteur 4 », un bureau d'études et de consulting spécialisé dans l'environnement et participe aux négociations de Kyoto et de Copenhague. Après avoir été président de l'ADEME (agence de la maîtrise de l'énergie) jusqu'en 2002, il devient directeur adjoint du cabinet ministériel de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement, alors occupé par Dominique Voynet. Il est ensuite consultant indépendant, expert auprès d'institutions et conférencier.

Il est l'auteur de L'Énergie dans l'économie, publié en 1988, ainsi que de Énergies de ton siècle ! Des crises à la mutation, en 2005. Il y propose une sortie du nucléaire civil avec les énergies renouvelables. Chef de la commission Energie des Verts, Pierre Radanne est l'auteur du rapport Facteur 4 sur la réduction des gaz à effet de serre de la France (2005).

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Nous avons vu plus haut quelle était la composition de ce Collectif. Force est de constater que la plupart de ses membres ont des postes d’importance et sont souvent des spécialistes dans leur domaine à l’image de Pierre Radanne. De là l’intérêt que l’on peut porter à ce type d’organisation : ce ne sont pas des citoyens lambdas qui ne maîtrisent pas les sujets qui évoquent ces idées presque utopiques tant elles remettent en cause les modèles de vie et de sociétés qui sont les nôtres ; mais ce sont des spécialistes qui sont allés sur le terrain qui osent penser à un « autre » monde.

Pour en savoir plus : Déclaration du Collectif (document PDF), Les Échos, Blog Oxfam, Kiagi 

 
Marion Daugeard 
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